Hommage à l’auteur Gildas BOURDAIS ,

décédé à Paris le 25 septembre 2024.

15 NOVEMBRE 2024

Jean Librero, traducteur, et éditeur. Responsable Flying Disk France.

C’était un samedi frileux, ce 02 décembre 2014. Je m’étais déplacé jusqu’à l’esplanade de la Défense pour assister à une conférence « sur les ovnis ». La soirée était organisé dans un self-service dont j’appris plus tard que c’était un lieu de réunion habituel pour un groupe d’initiés rassemblés sous l’enseigne OVNI Paris. Je ne connaissais presque personne dans ce milieu à l’époque, et encore moins le conférencier un auteur du nom de Didier Leroux.

Ce dernier, qui venait de publier un livre avec un coauteur du nom de Jean Goupil, donna ce soir-là une conférence instructive concentrée entre autres sur le « mystère marial » et l’énigme des visions de Fatima, au Portugal, en 1917. A la fin de la conférence suivie de questions, je me trouvai au début de la file de personnes qui voulaient faire dédicacer leur exemplaire du livre de l’auteur. Derrière moi dans la file, je reconnus un visage que j’avais vu en photo et dans quelques vidéos de la radio Ici et Maintenant. Après une brève et simple présentation, Gildas Bourdais me tendit sa carte de visite. Une telle simplicité décrit éloquemment le caractère de ce chercheur, direct et sans artifices.

Gildas était âgé de 85 ans quand il nous a quittés. Il vivait en partie reclus dans son bel et tranquille appartement dans une résidence cossue de Courbevoie, et sortait peu, à cause d’une motricité réduite. En tant que traducteur du livre Witness To Roswell, j’attendais un message de lui depuis plusieurs mois, car il s’était lui-même proposé pour réviser les premiers chapitres de la version française de ce livre majeur qu’il connaissait très bien dans son édition originale. Je regrette vivement de ne pas avoir pris les devants. Par égards pour sa personne et son âge, je ne voulais avoir l’air insistant, et en l’occurrence cela aurait été préférable.

Avec deux ou trois collègues, et avec l’accord qu’il m’avait donné expressément, j’avais prévu de réaliser une série de courtes interviews avec Gildas car, même s’il avait été reçu par de nombreux médias depuis les années 1990, il était loin d’avoir « tout dit » sur son impressionnant parcours dans l’ufologie. Les amateurs qui connaissent l’œuvre de Gildas et ceux qui veulent le découvrir pourront se plonger dans les archives de la radio Ici et Maintenant, rpour laquelle Gildas a contribué pendant de longues années.

Dans son bref hommage sur le site UAP Afrique, Ben Nodj nous rappelle que Gildas Bourdais a publié en 1990 une volumineuse anthologie de l’art contemporain, « Les Modernes et les autres- Cent ans d’art moderne dans le monde ». Cet écrivain était très connu et respecté dans le milieu de l’ufologie, et cependant beaucoup ignoraient qu’il était également un artiste-peintre de talent, et qu’il a exposé régulièrement en France. J’ai eu l’honneur de connaître et d’échanger régulièrement avec ce chercheur remarquable, connu comme un spécialiste du dossier Roswell. Lors d’un entretien, il m’avait expliqué les circonstances dans lesquelles il avait commencé à étudier les travaux des auteurs ufologues anglophones, qu’il connaissait si bien.

Au milieu des années 80, Gildas rêvait d’une carrière d’artiste alors qu’il résidait à New York, qui était déjà la nouvelle capitale des arts. Il connut Budd Hopkins, qui était alors une figure

très estimée de la scène artistique new-yorkaise, dans ce secteur sud de Manhattan connu sous le nom Grenwich Village.. Un autre professionnel du milieu artistique était proche de Budd Hopkins, et devint très célèbre par la suite dans le milieu ufologique. Il s’agit de Peter Robbins, qui vivait à Manhattan à la même époque, et qui a été invité récemment par la chaîne UAP Show, grâce à Marie-Thérèse de Brosses, une grande dame de l’ufologie, qui fut également une amie de Budd Hopkins, de Peter Robbins, et de Gildas Bourdais lui-même !

Photo peu connue de Budd Hopkins en compagnie de Philip Mantle en 1990

C’est ainsi, par le biais du monde des arts plastiques à New York, que se renforça l’intérêt de Gildas pour la littérature ufologique outre-atlantique, et que prit forme son intérêt de chercheur. Le livre emblématique de Budd Hopkins, Missing Time, est paru pour la première fois en 1981, et a été régulièrement réédité jusqu’à aujourd’hui.

Couverture de l’édition original de « Missing Time » en 1981.

Gildas, pendant son séjour aux Etats-Unis, avait donc déjà eu l’occasion de connaître les travaux de ce pionnier des recherches sur les enlèvements extraterrestres (on dit aussi abductions, anglicisme répandu). Le livre a par ailleurs été traduit en français au milieu des années 90. Le livre « Intruders », qui est sorti quelques années plus tard, examine entre autres cas celui de Linda Cortile, cas d’enlèvement « de masse » qui s’est précisément produit dans un secteur de Manhattan sud..jusqu’au fameux Brooklyn Bridge. Marie-Thérèse de Brosses fait un large écho à la carrière et à l’oeuvre de Budd Hopkins dans son livre de référence «Enquête sur les enlèvements extraterrestres » paru en 1995. Elle a entre autres connu personnellement ce témoin majeur qu’a été Linda Napolitano. Soulignons ici que le livre de référence Enquête sur les enlèvements extraterrestres sera réédité en ce début d’année 2025.

Couverture du livre de Marie-Thérèse de Brosses paru en 1995

Gildas a été reconnu en France comme l’un des rares experts (ou le seul ?) sur le présumé crash d’OVNI au Nouveau-Mexique, qui se serait produit dans une nuit du début de juillet 1947, dans un plateau désertique au nord de la ville de Roswell. Il a consacré quatre livres majeurs à ce dossier, et a étudié attentivement les synthèses des enquêtes des principaux chercheurs américains qui ont passé des années à fouiller ce dossier. Le livre qui a posé les fondements de ces recherches est bien sûr The Roswell Incident de William Moore et Charles Berlitz paru en 1980, et qui repose en partie sur les travaux de Stanton Friedman, qui fut le premier à recueillir le témoignage de l’officier à la retraite Jesse Marcel Sr

Couverture originale du livre The Roswell Incident en 1981.

Stanton Friedman publia sa propre synthèse en 1992 dans le livre Crash at Corona. Ce livre malheureusement peu connu en France donne des clés précieuses pour comprendre les circonstances qui ont entouré le témoignage de Jesse Marcel à partir de 1978. Entre temps, Kevin D. Randle et Donald R. Schmitt, qui allaient devenir les plus fameux spécialistes du cas, publièrent en 1991 UFO Crash at Roswell, qui devint une oeuvre de référence et un best-seller.

Gildas a méticuleusement étudié tous ces travaux, et ses propres écrits sont extrêmement bien documentés, tant par de scrupuleuses notes de bas de page que par les bibliographies. Ces bibliographies comprennent les références d’un grand nombre d’auteurs et chercheurs, en particulier américains, qui reflètent l’étendue des recherches de l’auteur. Dans nos entretiens, il citait volontiers par exemple le Dr. Bruce Maccabee, un des plus connus spécialistes de la censure gouvernementale sur la question OVNI, et qui a quitté ce monde il y a peu de temps. La bibliothèque privée de Gildas était particulièrement volumineuse. Il a fait don d’une partie de ses archives à l’association SCEAU.

Le livre qui est présenté ci-dessous a pour titre original WITNESS TO ROSWELL.

C’est un des livres les plus fameux de toute la littérature OVNI aux Etats-Unis, un des plus retentissants best-sellers mondiaux dans le domaine. Il est sorti pour la première fois en 2009, réédité un an plus tard, puis réédité régulièrement jusqu’à aujourd’hui. La traduction française correspond à l’édition actualisée de 2023, avec préface de l’astronaute Edgar Mitchell et postface de George Noory, le célèbre animateur du média Coast To Coast AM.

Edgar Mitchell, un des astronautes de la mission Apollo14 en 1971, s’est activement engagé dans les recherches sur la thématique extraterrestre à la fin de sa vie. En l’occurrence, étant le fils d’une famille de fermiers du sud du Nouveau-Mexique, il terminait en 1947 ses études secondaires dans une high school d’une petite ville à quelques dizaines de kilomètres au sud de Roswell.

Witness To Roswell a été une oeuvre maîtresse pour tous les amateurs sérieux dans l’étude et la compréhension du cas Roswell. C’est une synthèse de travaux d’une durée de plus de vingt ans, par Don Schmitt, qui commença l’enquête en 1988, et son associé Tom Carey. Gildas Bourdais avait une mémoire impressionnante et pouvait relater avec aisance le déroulement de tel ou tel épisode majeur tels qu’ils ont été patiemment documentés par ces enquêteurs exceptionnels. J’ai eu la chance de participer en 2017 sur un média français à une interview de Schmitt et Carey, et le nom de Gildas Bourdais a évidemment été cité à un moment. Tom Carey a conformé explicitement qu’ils se connaissaient personnellement. Cette interview a été réalisée à l’initiative d‘Olivier de Sedona, responsable de la chaîne Ufo Conscience. On doit pouvoir la retrouver dans les archives et auprès des abonnés.

Portrait de Thomas J. CAREY, prestigieux coauteur de WITNESS TO ROSWELL (2009)

J’ai eu l’honneur aussi de participer à une émission en duo avec Gildas Bourdais sur le média BTLV en 2017, à l’occasion de la sortie du livre Les Enfants de Roswell, de Carey et Schmitt, traduit pour les Editions Atlantes. Gildas et moi avons également été invités dans la même période sur France Culture pour deux enregistrements « sandwichs »de trente minutes chacune, par un triste sire au questionnaire « régurgité » et qui prétendait préparer un documentaire. L’honnêteté intellectuelle avait déserté ce plateau depuis longtemps..

Publier la traduction de WITNESS TO ROSWELL fut un grand privilège, non seulement par respect et reconnaissance pour ces deux auteurs remarquables, Tom Carey et Don Schmitt, mais également parce que cette publication éclairera très directement les sources auxquelles Gildas Bourdais a puisé dans la rédaction de ses oeuvres, qui resteront impérissables pour la littérature ufologique de langue française.

Alors que sa réputation de chercheur et d’auteur est établie, beaucoup ignorent que Gildas ne s’est pas limité à une étude « livresque ». Comme je le rappelais plus haut, il a vécu quelques années aux Etats-Unis, a connu de grands chercheurs, et a assisté à de nombreuses conventions ufologiques, conférences et congrès en Amérique et dans d’autres pays. Quand la nouvelle de son décès a été partagée, nous avons reçu un message de Roberto Pinotti, président du Centro Ufologico Nazionale (C.U.N.) en Italie, qui rappelait que Gildas avait participé pendant de nombreuses années aux éditions successives de ce symposium ufologique international, connu sous le nom de Congrès annuel de San Marino.

Gildas a été orateur à plusieurs reprises à San Marino, situé à une heure de route au sud de Bologne, près de la côte adriatique. J’étais présent moi-même à San Marino en juin 2024, et j y ai effectivement rencontré de nombreux ufologues italiens, mais aussi des représentants venus de Grèce, du Portugal, d’Allemagne, du Royaume-Uni, et le célèbre témoin militaire américain, l’ex Captain Robert SALAS , auteur de plusieurs livres retentissants, parmi lesquels FADED GIANTS.

Gildas aimait rappeler sa présence à Brasilia en 1997 à l’occasion du Forum Ufologique Mondial organisé par l’ufologue brésilien A.J. Gevaerd, qui est décédé il y a deux ans. Gildas nous confiait qu’il avait été invité à l’initiative de l’auteur russe Boris Shurinov (Chourinov?) qui avait été impressionné par les chapitres détaillés consacrés à l’incident Roswell. A Brasilia, Gildas avait cotoyé Budd Hopkins, Stanton Friedman, Roger Leir, David Jacobs ainsi que des ufologues brésiliens talentueux et moins connus en Europe. Ces contacts ont d’ailleurs été un « incitateur » pour son œuvre de traducteur, puisque Gildas a traduit quelques années plus tard, en 2004,, pour le Mercure Dauphinois, le livre de Roger Leir consacré au dossier Varginha. L’incident de Varginha était survenu en janvier 1996, un an avant le Forum de 1997, qui lui fut largement consacré, ainsi qu’à d’autres thématiques « OVNI ».

En conclusion, je partagerai ici un élément peu connu de la réflexion et des recherches de Gildas : Même s’il ne s’en confiait qu’à peu de personnes, il avait suivi avec attention les révélations de Michael Relfe qui en 2002 avait été l’un des premiers témoins et divulgateurs autour des dits programmes spatiaux secrets. Contrairement à ce que certains pourraient penser, Gildas prenait très au sérieux les éléments rapportés dans le livre Mars Force Book 1. Il avait suivi attentivement aussi les conférences et écrits de Corey Goode à partir de 2013 dans sa série d’interviews Cosmic Disclosure. Gildas n’était sans doute pas convaincu par les déclarations de ce témoin prétendu des programmes spatiaux secrets, mais il avait pris le temps et la peine de les étudier, au point de me confier dans un entretien privé : « Corey Goode a un agenda secret ». Je n’ai jamais eu le temps de lui demander de développer son sentiment sur ces questions si lourdes des PSS, dont les enjeux sont à mon avis extrêmement plus importants que les révélations et concessions récentes lors des auditions au Congrès américain. Ici encore, Gildas Bourdais avait montré son remarquable discernement.

Gildas a longtemps entretenu également un blog très documenté. Souhaitons qu’il reste longtemps accessible.

Lorsque j’ai entrepris d’écrire cet article d’hommage à celui qui a été un vrai ami, généreux au-delà de toute mesure et sous de nombreuses formes, c’était la soirée du 01 au 02 décembre 2024. J’ai voulu me rappeler dans quelles circonstances j’avais fait connaissance avec cet auteur prestigieux, et j’ai recherché les références de cette conférence de Didier Leroux au « Flunch » de La Défense, pour l’association OVNI Paris. La date était le 02 décembre 2014, soit il y a exactement dix ans. Ai-je reçu un message de l’au-delà pour entreprendre ce salut posthume à cette date anniversaire ? Vision céleste ? Vision cosmique ?

Au revoir Gildas, et merci pour tout et surtout pour votre engagement admirable et exemplaire, votre détermination sans faille pour la vérité et la divulgation, dans un milieu rongé par la désinformation, la complaisance et les sordides combinaisons « d’appareils »..